Migrant Stories

Sensibiliser aux dangers de la traite d’êtres humains et de la migration irrégulière

par Danilo Valladares, OIM Guatemala dvalladares@iom.int

« Personne ne m’a dit que j’allais devoir payer 20 000 dollars pour aller aux Etats?Unis. Ce n’était pas prévu. Comment rembourser cette somme et nourrir ma famille restée au pays ? » demande, indignée, une femme autochtone victime de la traite d’êtres humains, au producteur de fraises américain qui a payé un réseau de criminels afin qu’ils l’amènent de son village, au Guatemala,  à sa ferme en vue d’exploiter sa main?d’œuvre. 

Par chance, cette femme et le fermier participaient à un jeu de rôles lors d’un récent atelier de l’OIM consacré à la prévention de la traite d’êtres humains et de la migration irrégulière, financé par l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID).

Quelque 125 dirigeants communautaires et autres représentants d’autorités locales ont marché pendant des kilomètres pour assister à l’atelier, organisé par une chaude matinée à Comitancillo, dans l’ouest du Guatemala, où vit une communauté autochtone mam.

Ramiro Coronado, maire de Comitancillo et participant à l’atelier, a déclaré à la foule : « Cette formation est très importante pour nous car elle permet aux maires et aux conseils de développement communautaire de savoir ce qui peut arriver aux migrants pendant qu’ils se rendent aux Etats?Unis. »

Pendant leur voyage à destination du Mexique et des Etats-Unis, les migrants originaires du Guatemala et d’Amérique centrale sont souvent victimes d’enlèvements, d’extorsion, d’agressions et de traite. Pourtant, malgré ces risques, des milliers de personnes, dont beaucoup viennent de villes frontalières, prennent chaque jour la route vers le nord.

Situé sur la frontière mexicaine, San Marcos est l’un des départements où l’émigration est la plus forte. C’est aussi celui qui reçoit 11 % des fonds rapatriés dans le pays, ce qui le place au deuxième rang après le département de Guatemala, où se situe la capitale, dont la part des rapatriements de fonds s’élève à 18 %.

M. Coronado a souligné l’importance de cette manifestation, organisée à la suite du tremblement de terre de novembre qui a poussé davantage encore les habitants de San Marcos à émigrer vers le Mexique et les Etats-Unis, en quête d’un emploi qui leur permette de reconstruire leurs logements détruits ou endommagés.

L’atelier s’inscrit dans le cadre d’une série de manifestations qui visent à sensibiliser la population du département de San Marcos aux risques de la traite d’êtres humains et de la migration irrégulière.

« L’OIM a organisé des ateliers sur les dangers de la traite des personnes et de la migration irrégulière avec les autorités de huit municipalités et de 499 communautés du département de San Marcos », a déclaré Philip Burns, Assistant de projet de l’OIM à San Marcos.

San Marcos est aussi un important lieu de transit pour les centaines de Centraméricains qui, chaque jour, franchissent la frontière poreuse entre le Guatemala et l’Etat du Chiapas, au Mexique.

« Notre but est d’informer la population à haut risque des dangers de la migration irrégulière, et plus particulièrement de ceux de la traite d’êtres humains, à laquelle les populations autochtones, les personnes ayant un faible niveau d’éducation, les femmes et les enfants sont particulièrement exposés », a ajouté M. Burns.

Les participants ont confié à l’OIM qu’ils ont beaucoup appris durant ces ateliers, sur des sujets rarement abordés dans ces communautés éloignées.

De fait, Delfino Pérez, un dirigeant communautaire qui a participé au dernier atelier, a admis qu’il n’avait jamais entendu parler de la traite d’êtres humains auparavant. « C’est un sujet très important, car les migrants sont toujours confrontés à des agresseurs durant leur voyage, et ils ont parfois des accidents », a déclaré M. Pérez.

Il a ajouté : « Le Guatemala est un pays très pauvre. Ses habitants sont donc forcés d’aller chercher aux Etats-Unis des moyens d’améliorer leurs conditions de vie. »

« Les autorités locales et les dirigeants des communautés jouent un rôle central dans la prévention et dans la lutte contre la traite des êtres humains. Il est donc indispensable que l’OIM continue à les sensibiliser à ces questions », a estimé M. Burns.

Ce ne sont pas les seules activités que l’OIM organise dans ce département de l’ouest du pays. Elle a contribué à la réintégration de 239 enfants vulnérables et migrants adolescents dans la municipalité de Concepción Tutuapa.

Les enfants sont particulièrement exposés à la traite d’êtres humains, à l’exploitation sexuelle et à l’exploitation par le travail comme ouvriers agricoles  ou vendeurs ambulants à Tapachula, au Mexique, ou dans les régions voisines.

De 2010 à 2011, l’OIM a fourni des bourses d’études et mis en place 63 projets productifs à l’intention de 139 enfants âgés de 10 à 17 ans.

« Parmi ces enfants, 60 % avaient migré plus de deux fois à Tapachula et dans d’autres villes du Mexique. Les 40 % restants avaient de fortes chances de migrer eux aussi, car leurs frères et sœurs étaient déjà partis », a déclaré Walter Arreaga, de l’OIM Guatemala.

Ils ont reçu des poules, des porcs et des moutons afin qu’ils puissent contribuer aux besoins de leur famille, ainsi que des semences de pommes de terre, de radis et d’autres légumes destinés à leur consommation personnelle. De plus, un soutien psychosocial leur a été apporté, et ils ont été sensibilisés aux risques de la migration irrégulière et de la traite d’êtres humains.

« Avec deux enseignants, nous avons suivi les progrès scolaires de ces enfants, et tous ont réussi leurs examens. Par ailleurs, nous avons associé les parents et les autorités locales aux activités de sensibilisation aux risques de la migration et de la traite. Grâce à ces mesures, 95 % des enfants que nous avons aidés n’ont pas migré à nouveau », a ajouté M. Arreaga.

En 2012, 100 autres enfants ont bénéficié du projet de l’OIM, avec les mêmes résultats. En octobre dernier, l’OIM a élargi la portée de ce projet, et octroie désormais des bourses d’études à des enfants de Tacana et de Tajumulco, deux autres municipalités où l’émigration enfantine est élevée.