Communiqué
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160 migrants éthiopiens sont poussés par-dessus bord au large du Yémen par des passeurs après les quelque 50 décès déjà recensés hier dans les mêmes circonstances

Aden – 160 migrants éthiopiens ont été poussés par-dessus bord au large des côtes du Yémen ce matin (10/08). Cet incident intervient le lendemain du décès présumé de 50 migrants éthiopiens et somaliens morts dans des circonstances similaires. Comme hier, la tragédie a eu lieu au large des côtes de Chabwa, gouvernorat du Yémen situé le long de la Mer d’Arabie, mais à un endroit différent plus proche de la côte.

Le personnel de l’OIM, l’organisme des Nations Unies chargé des migrations, a découvert six corps sur la plage : deux hommes et quatre femmes. Quelque 13 autres migrants éthiopiens sont toujours portés disparus. L’OIM a fourni une aide médicale d’urgence à 57 migrants aujourd’hui. Elle a également distribué de la nourriture, de l’eau et d’autres types de secours d’urgence aux migrants rescapés. 84 migrants (en plus des 57) avaient quitté la plage avant l’arrivée de l’OIM.

Chaque année, des milliers de migrants risquent leur vie lors de ce dangereux périple en direction des pays du Golfe, en passant par le Yémen, un pays en crise. Le périple et la situation au Yémen sont extrêmement dangereux pour les migrants. Les effets psychologiques qu’ont ces expériences sur les enfants peuvent être dévastateurs. C’est pourquoi l’OIM intègre des psychologues dans les équipes en patrouille sur les plages yéménites. Les agissements meurtriers des passeurs portent le nombre total de décès présumés ces deux derniers jours à près de 70. Pour plus d’informations sur la tragédie d’hier, veuillez consulter notre précédente publication : http://www.iom.int/fr/news/une-cinquantaine-de-migrants-ethiopiens-et-somaliens-meurent-noyes-jetes-par-dessus-bord-par. L’OIM recense 114 morts ou disparus au large des côtes yéménites en 2017 (Golfe d’Aden et Mer Rouge en direction du Yémen), contre 109 en 2016. Le nombre total cette année sera vraisemblablement plus élevé.

Les survivants des deux incidents ont raconté à l’OIM leur périple avec les passeurs : tout au long du voyage, les migrants ont été traités avec brutalité par les passeurs. Ils ont été forcés à s’accroupir pendant toute la durée du voyage depuis les côtes d’Ambah en Somalie, qui dure parfois entre 24 et 36 heures, pour que les passeurs puissent prendre plus de personnes à bord. Les migrants n’avaient pas le droit de bouger sur le bateau. Ils n’avaient droit à aucune intimité pour faire leurs besoins et ont dû s’uriner dessus. Dans certains cas, les passeurs leur avaient ligoté les mains pour qu’ils ne puissent pas nager et survivre en cas de besoin. Si l’un des migrants bougeait par accident, il était battu ou même tué. Les migrants n’avaient pas le droit de prendre suffisamment d’eau ou de nourriture pour subvenir à leurs besoins pendant la durée du voyage. Ils ne pouvaient prendre qu’un à deux litres d’eau et un petit repas. Ils ont aussi fait face à de nombreux dangers pendant le voyage en pleine saison venteuse.

Les migrants ayant survécu d’autres périples du même type ont raconté à l’OIM que les réseaux de passeurs s’organisent lorsque les migrants arrivent au Yémen pour qu’ils aient un lieu de prise en charge. Les migrants qui peuvent payer davantage sont emmenés en voiture vers des destinations inconnues. Les autres qui n’ont pas d’argent doivent marcher de longues distances sans savoir où ils vont.

« Récemment, les passeurs ont commencé à pousser les migrants par-dessus bord, craignant que les forces de sécurité ne les arrêtent. C’est ce qu’il s’est passé à Chabwa ces deux derniers jours », a déclaré Lina Koussa, chargée des interventions d’urgence de l’OIM à Aden.

« Nous condamnons les agissements des passeurs au large des côtes du Yémen – 120 migrants éthiopiens et somaliens ont été forcés à sauter par-dessus bord hier et 160 aujourd’hui, le bilan reste inconnu », a déclaré William Lacy Swing, Directeur général de l’OIM.

« Le mépris le plus total qu’ont ces passeurs et ceux du monde entier pour la vie humaine est tout simplement immoral. Que vaut la vie d’un adolescent ? Le long de cet itinéraire vers les pays du Golfe, elle peut ne valoir qu’une centaine de dollars. Il y a quelque chose qui ne va pas du tout dans ce monde si d’innombrables enfants peuvent être jetés à la mer délibérément et sans pitié dès qu’ils ne sont plus une source de revenu et rien n’est fait pour empêcher que cela ne se reproduise », a poursuivi le DG Swing.

« Cela ne devrait même pas se produire. Nous ne devrions pas avoir à attendre que de telles tragédies se produisent pour nous rappeler que la coopération internationale doit être renforcée en vue de lutter contre la traite des êtres humains – pas seulement au moyen de politiques mais grâce à des actions concrètes le long de ces itinéraires de trafic illicite d’êtres humains. Cet itinéraire est très fréquenté et extrêmement dangereux. Le Yémen traverse l’une des plus graves crises de notre temps. Les pays confrontés au conflit ou à la crise comme le Yémen ont besoin d’un plus grand soutien pour renforcer l’application des lois et la gestion humanitaire des frontières en vue de protéger les migrants vulnérables comme tous ces jeunes de 16 ans. Mes premières pensées vont à leurs familles et à leurs proches en Ethiopie et en Somalie. Je leur fais la promesse que l’OIM ne les oubliera pas et qu’elle continuera de se battre pour protéger les droits et la dignité des futures générations de migrants », a conclu le DG Swing.

Pour plus d’informations, veuillez contacter Olivia Headon, siège de l’OIM à Genève, Tel : +41794035365, Email : oheadon@iom.int