Communiqué
Global

Des milliers d’habitants continuent de fuir l’ouest de Mossoul

Iraq - D’après l’armée et la direction du camp, ce sont en moyenne 10 000 personnes qui fuient chaque jour l’ouest de Mossoul et qui arrivent dans la zone de transit à Hamam-al-Alil.

Jeudi dernier, 18 mai, le nombre de personnes fuyant l’ouest de Mossoul a atteint son apogée lorsque quelque 16 100 individus sont passés par le site d’enregistrement, d’après les chiffres du gouvernement. Il s’agissait du plus important mouvement de personnes officiel depuis le début de l’opération à Mossoul le 17 octobre 2016.

Au vu des températures assommantes pendant la journée, la plupart choisissent de partir dans les heures plus fraîches de la nuit, marchant plusieurs heures avant d’atteindre les postes de contrôle militaires.

De là, les hommes, les femmes et un grand nombre d’enfants sont transportés vers la ville d’Hamam-al-Alil, au sud de Mossoul, sur les rives ouest de l’Euphrate, dans le gouvernorat de Ninive.

La ville, qui est la plus grande au sud de Mossoul, est devenue le point de transit de dizaines de milliers de familles ayant fui le conflit à l’ouest de Mossoul.

Le camp adjacent au site ayant atteint sa capacité maximale, de nombreuses familles sont déplacées vers d’autres camps et un grand nombre de déplacés choisissent de se rendre à l’est de Mossoul pour rester avec leurs familles, amis ou dans des logements en location.

D’après les chiffres du gouvernement iraquien, plus de 742 000 personnes ont été déplacées de Mossoul et de sa périphérie depuis le 16 octobre 2016, lorsque l’offensive militaire a débuté. Depuis le lancement de la seconde phase de l’offensive militaire visant à reprendre la ville mi-février, 566 000 personnes ont été déplacées de l’ouest de Mossoul, dont plus de 73 000 Iraquiens pendant la seule semaine écoulée.

Environ 117 732 personnes sont retournées dans leurs lieux d’origine à l’est de Mossoul, tandis que 34 841 sont retournées à l’ouest.

Le nombre actuel d’habitants de l’ouest de Mossoul qui restent déplacés à ce jour s’élève à 531 000. Environ 200 000 personnes sont toujours emprisonnées dans les territoires de Daech dans la vieille ville de Mossoul. Au 23 mai, la Matrice de suivi des déplacements (DTM) de l’OIM a recensé et localisé plus de 377 000 individus (près de 63 000 familles), actuellement hébergés dans des camps et des sites d’urgence. Ce chiffre comprend des personnes vivant dans des communautés d’accueil, des sites de fortune et des maisons en location.

A Hamam-al-Alil, mercredi (24 mai), les familles arrivant des zones récemment reprises ont parlé des atrocités commises par Daech, des pénuries extrêmes de nourriture, de médicaments, d’eau et de courant et de la peur de se faire tirer dessus en tentant de fuir. « Nous sommes venus à manquer de nourriture et avons dû manger du blé moulu et les enveloppes du blé que nous avions stocké », a confié Um Omar.

Elle a expliqué que vers la fin, leurs repas consistait en du foin bouilli.

Une autre femme entourée de ses enfants épuisés et agités a confié qu’elle connaissait des familles qui coupaient de l’herbe et des plantes sauvages pour les manger.

Près de 85 000 enfants sont toujours bloqués depuis l’offensive lancée pour reprendre Mossoul et l’eau dans les camps pour les déplacés commence à manquer selon l’UNICEF.

Pour bon nombre de déplacés, l’arrivée au camp est une renaissance malgré les difficultés, le long périple à pied pour atteindre la sécurité, la peur et la faim.

Le nouveau leitmotiv ou slogan des déplacés internes iraquiens qui parviennent à échapper à Daech est devenu : « Dieu merci, nous renaissons. »

Cependant, tous n’ont pas cette chance.

A l’hôpital de campagne de l’OIM, installé en partenariat avec le Croissant-Rouge qatari à Hamam-al-Alil, le jeune Abdul Rahman sanglote sans retenue en racontant le jour où Daech a attaqué sa maison au mortier, tuant son frère et le blessant à la jambe.

« J’ai peur… », a déclaré le jeune garçon squelettique de 11 ans, en sanglots, sur son lit d’hôpital.

« J’ai perdu ma jambe… », pleure-t-il. « Je ne pourrai plus jamais courir ou jouer au football. »

« Mon frère était assis à côté de moi lorsque la maison s’est écroulée sur nous et il est mort », raconte Abdul Rahman, allongé sur son lit d’hôpital, la jambe droite amputé juste au-dessus du genou.

Dans l’incapacité de quitter la maison en raison du déluge de mortiers tirés par Daech sur leur quartier ce jour-là, Ahmad, 22 ans, le frère d’Abdul, et le père d’un bébé de huit mois, se sont vidés de leur sang pendant des heures avant de mourir.

Le père d’Abdul a finalement pu porter son jeune fils blessé pour le mettre en sécurité. Il aura fallu cinq jours et cinq endroits différents avant que le jeune garçon n’arrive à l’hôpital de l’OIM et du Croissant-Rouge qatari, où il a pu recevoir des soins.

Lorsqu’il est arrivé à l’hôpital de l’OIM, malgré les efforts acharnés des chirurgiens pour sauver sa jambe, les tissus des artères touchées étaient morts et la jambe du jeune Abdul Rahman a dû être amputée.

A mesure que les forces militaires iraquiennes se rapprochent de la vieille ville et des derniers quartiers, les témoignages des blessés et des personnes qui ont fui suggèrent que Daech continue de resserrer son dernier étau autour des civils.

« Ils font des appels depuis les minarets des mosquées, avertissant qu’ils tireront sur les enfants si les familles tentent de fuir », a déclaré Um Ahmad.

« Ils placent même des pièges devant les portes d’entrée pour nous empêcher de fuir », a déclaré Hassan, allongé sur un lit de l’hôpital de l’OIM, en attendant de guérir des blessures à sa jambe.

A son insu, Daech a déposé des explosifs à l’entrée de sa maison. En sortant de chez lui, la bombe a explosé.

Dans un autre lit, Saadoun veille d’un lit à l’autre sur ses deux jeunes garçons : Qaws, 3 ans, blessé à la jambe, et Yassin, 7 ans, blessé à la tête.

Au camp de Hamam-al-Alil, où les sept membres de la famille sont entassés avec des proches dans une tente, il a laissé ses trois autres enfants qui sont aussi blessés.

Une bombe visant la maison de leur voisin, que Daech occupait en se servant de la famille comme bouclier humain, a détruit sa maison qui s’est écroulée sur eux.

Ses cinq enfants ont tous été blessés et ses voisins ont été tués, ainsi qu’une grand-mère et deux enfants.

« Je n’ai pas pu dégager mes voisins des décombres », déplore Saadoun avec tristesse.

En date du 20 mai, d’après l’OCHA, quelque 12 500 personnes – dont 6 369 personnes de l’ouest de Mossoul seul –  ont été transférées depuis les zones de première ligne vers des hôpitaux pour soigner leurs traumatismes et leurs blessures.

« Le fait qu’un nombre considérable d’Iraquiens continuent de fuir l’ouest de Mossoul malgré les risques encourus, témoigne à la fois de la situation désespérée dans le secteur et de la tâche énorme qui nous attend pour soulager les souffrances des déplacés internes. L’OIM et nos partenaires humanitaires, en coopération avec le gouvernement iraquien, continueront de fournir une aide humanitaire globale aux déplacés internes dans toute la mesure de nos ressources », a déclaré Thomas Lothar Weiss, chef de mission de l’OIM en Iraq.

La DTM de l’OIM surveille activement le déplacement à travers l’Iraq. Les derniers chiffres du suivi de l’urgence de la DTM de l’OIM sur le déplacement à travers l’Iraq causé par les opérations à Mossoul sont disponibles sur : http://iraqdtm.iom.int

Pour plus d’informations, veuillez contacter l’OIM en Iraq : Hala Jaber, Tel: +964 751 740 1654, Email: hjaberbent@im.int ou Sandra Black, Tel: +964 751 234 2550, Email: sblack@iom.int